Jules Calimbre Chronique de trois femmes et de trois maisons

Jules Calimbre

Chronique de trois femmes et de trois maisons

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La vie de Jules Calimbre s'étale au long d'un siècle, le sien, assis carrément sur les dix-neuvième et vingtième siècles de notre ère. Il est né dans ce qui était une forme d'artisanat colonial à la petite semaine, sous Napoléon III, pour s'éteindre dans un Nouméa, qui commençait à se vouloir une ville moderne, et qu'il avait contribué à permettre de rattraper son temps. Il a tout connu des événements, y a participé sans jamais se vouloir au premier plan, sans jamais porter jugement autre que silencieusement, marquant sa distance par son comportement personnel. On a dit qu'il était dur en affaires, alors qu'il a prêté de l'argent - sans intérêts - à tous ses amis dans le besoin, qui ne lui ont presque jamais rendu. Il a retardé son départ pour la France, où il aurait peut-être pu être soigné, pour faire « rentrer » l'argent qu'il avait « dehors ». Il a tout essayé des affaires possibles, précautionneusement, jamais directement, conservant intacte sa vocation propre de premier aconneur du pays. Ce métier, qu'il avait appris en Australie, il le connaissait bien et le pratiquait sans fautes, donnant physiquement la main à ses ouvriers, toujours présent, l'œil à tout, jamais le blanc qui commande aux noirs et ne fait rien de ses dix doigts. Il aura été le principal employeur de main-d'œuvre canaque, qu'il traitait honnêtement, avec scrupule et générosité, à une époque où tant d'autres n'appliquaient même pas les règles officielles, payant mal, nourrissant mal ou pas du tout. Il avait reçu de son père une leçon, dont il était fier, c'est qu'il était possible de faire techniquement confiance aux Mélanésiens, et de les employer à tous les niveaux de l'époque, et surtout de ne pas les considérer comme une main-d'œuvre servile, taillable et corvéable à merci. Ce qu'il faisait dans ce sens, il ne le criait pas sur les toits, se contentant d'agir chaque jour avec humanité et gentillesse, sans en tirer de principes proclamés publiquement. Le système colonial, qui ordinairement ne tolérait pas qu'on le mette en accusation, le laissait faire. Il respectait la loi du moment, allant au-delà dans la générosité, mais cela les Canaques étaient les seuls à le savoir. Les centaines d'entre eux qui ont suivi son cercueil et celui de Madame Calimbre, ont montré qu'ils avaient compris que l'homme pour lequel ils avaient travaillé, sortait de l'ordinaire. Il aurait été le meilleur dans toutes les circonstances. Les femmes légitimes de sa vie, celles qui régnèrent sur ses maisons successives, sa mère, son épouse et sa fille adoptive, ont été de la même trempe, honnêtes et loyales dans la vie quotidienne, fortes dans l'adversité, généreuses vis-à-vis de leurs amis. Leur vie aussi a porté témoignage de la qualité de cet homme hors du commun.

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